Nous sommes dans le dernier mois du voyage, à terminer un beau road-trip à travers l’île du Sud. Si les paysages sont magnifiques, c’est aussi une période de bilan pour nous. Et ça nous pousse à réfléchir sur le négatif : ce qui nous déplaît ici, ce qui nous manque, et pourquoi on ne s’installera jamais à l’opossum du monde.
Pour le premier article, on vous explique ce qui nous a déçu en Nouvelle-Zélande.
Jeu des 7 différences de fonctionnement
En Nouvelle-Zélande, vous pouvez payer $40 pour un simili-reblochon au lait pasteurisé. Il faudra aller le chercher loin, en voiture polluante dans un magasin spécialisé ressemblant à votre propre maison qui ferme à 16h30. Vous pourrez toujours vous réconforter en vous éclatant le samedi soir dans le seul bar qui ferme à 23h et qui vous sert des mini-pintes de craft-beers à $15.
Vous l’aurez compris, la Nouvelle-Zélande a plein de petits fonctionnements proches de nôtres, mais un peu différents qui peuvent être déprimants à force.
Nous avons déjà évoqué l’absence totale d’architecture. Les maisons de plein pied tout en bois avec leur petite véranda et leur grand jardin sont un standard indépassable. Curieusement, c’est l’une des choses qui nous manque le plus. Pour nous, le moindre muret de briques rouges est un summum du premier art.

Pour les horaires, on s’est habitué durant l’hiver, mais c’est à nouveau bizarre de voir tous les commerces fermer à 17h max quand le soleil se couche à 22h passées. Les cuisines de restos ferment toujours à 21h, les grosses soirées ne dépassent jamais minuit. Même si c’est une bonne habitude de se lever tôt et de suivre le rythme du soleil, il est dommage de ne pas avoir le choix de faire autrement même en ville.
Le pays est cher. On le voit mieux en road-trip maintenant qu’on ne travaille plus. Les attractions touristiques coûtent toujours cher ($44/personne pour un téléphérique en centre-ville par exemple). Problème, ce n’est pas mieux pour les produits du quotidien. Pour ce qui est importé, ça semble normal. Si c’est pas néozélandais, australien ou philippin, ça vient forcément de très loin, donc c’est cher. OK. Mais les produits locaux sont aussi chers et moins bien. En gros, l’industrie agroalimentaire fait payer le même prix qu’en vente à l’export… pour les produits impropres à l’exportation. Vous avez donc des pommes avec des gnons et des oignons moches à peine moins chers, ou du mouton vendu comme de l’agneau au même prix qu’en France.

Comme déjà dit, le pays se vit en voiture. Les villes sont très étalées, donc une voiture est toujours nécessaire pour la moindre petite course, à moins d’être en centre-ville dans l’une des 5 grandes villes du pays. Contrairement à chez nous, l’automobiliste est prioritaire au piéton et ne vous laissera jamais passer d’abord.
Et on voit donc le paradoxe écologique du pays. Ils nous enjoignent à ne pas laisser nos déchets dans les zones de camping et à faire des gestes écolos du quotidien, mais de leur côté ils polluent dans des gros 4×4 tout le temps. Ils pulvérisent leurs propres forêts et tentent d’éradiquer les opossums et chats sauvages qu’ils ont eux-mêmes introduits « par erreur ». Ils ne vivent que par l’exportation de masse : viande de boeuf et mouton (le premier étant la viande d’élevage la plus polluante possible), pommes, kiwis (pour avoir des fruits hors saison toute l’année en occident, youpie l’écologie !), vins ou encore le bois de pin… car oui, ils protègent les forêts, mais plantent des pins aux aiguilles acides qui tuent toutes les autres plantes et favorisent les écroulements de pistes (et en effet, on a subi de nombreuses routes en travaux et pistes fermées).
Bref, sur ce point, ils sont encore pire que la France. Et pourtant on a Macron qui dit « make our planet great again » tout en utilisant la taxe carbone pour le CICE. Fallait le faire pour être plus hypocrite !

Choc de(s) culture(s)
Les parenthèses sont nécessaires dans ce titre, car pour avoir un choc, il faut qu’il y ait une culture qui se culbute à la nôtre. Or il n’en est rien.
La Nouvelle-Zélande n’a pas de culture propre. Pour les musées, vous aurez donc le choix entre un musée sur la guerre 14-18 et le fameux débarquement à Gallipoli, ou un musée sur l’armée et les prestigieux conflits néozélandais : guerre des Boers en Afrique du Sud au service des Britanniques, ou guerre du Vietnam et d’Afghanistan plus récemment au service des Américains. C’est limite s’ils ne sont pas encore une colonie britannico-américaine. Vous trouverez bien quelques galeries d’art, aussi bien en ville qu’au beau milieu de nulle part, mais ça casse rarement 3 pattes à un kiwi.

Il y a cependant la culture Maori. Elle semble plus riche, avec une histoire longue de 7 siècles et remontant au peuplement de l’Austrasie, une mythologie et des croyances propres, une langue et un autre relation à la nature, une grande place pour les motifs en spirale qu’on retrouve sur leurs tatouages ou dans leur sculptures, le travail du bois et du jade, etc.
Oui… mais ce n’est hélas plus qu’un totem mis en avant par les colons installés ici. Villes et paysages sont entièrement occidentaux. Vous trouverez bien une petite sculpture par ci, un nom écrit en maori par là, un panneau descriptif des traditions liées à telle montagne, un village traditionnel préservé et payant, un fait divers entre tribus rivales par ci… mais c’est tout. La culture longtemps écrasée n’a pas été replacée à l’égale de la leur par miracle. L’utilisation faite par l’excellent marketing touristique du pays est très visible, mais le reste non. Dommage, il y a sûrement des choses à apprendre.

Je passe vite sur le reste. On a déjà évoqué la gastronomie basée sur les tourtes à la viande, les fish & chips et les pizzas à l’ananas, et je ne reviendrai pas une fois de plus sur l’architecture. Les cinémas sont rares et ne passent quasiment que des blockbusters, et je ne parle pas des théâtres – plus rares encore – qui passent plus de comédies musicales façon broadway que de Shakespeare. Les néozélandais seront donc ravis d’évoquer la beauté de leurs paysages, leurs longues randonnées, leurs jolis oiseaux, leur passion pour le sport, le bricolage ou leur dernière partie de chasse. C’est déjà super et il y a beaucoup à apprendre de leur connaissance de la nature ou de leur débrouillardise au quotidien. Mais il sera difficile de leur arracher autre chose de conséquent.
Des esprits néozélandais
Transition toute trouvée pour parler directement des habitants et de la société néozélandaises. On est ici avec une majorité d’Anglo-Saxons, des insulaires isolés issus d’une logique coloniale. Ca se ressent.

Il y a des bons côtés : ils sont ouverts et discutent facilement, ils ont une certaine fierté de vivre dans de belles îles au bout du monde, avec une volonté de s’affirmer comme un pays unique et indépendant.
Mais en contrepartie, même s’ils sont très cordiaux, vous ressentirez toujours une certaine distance de sécurité qui rendra difficile de s’en faire des amis, notamment car ils évitent les conversations de fond pouvant amener un conflit. Ils préfèrent donc un bon passif-agressif aussi désagréable que délétère. Si vous additionnez à ça ce que j’ai dit sur les maoris qui sont leur égaux mais confinés dans des jobs précaires, et dont la culture est étudiée comme une langue étrangère à l’école… vous pouvez ressentir une sorte d’hypocrisie latente et vaguement coloniale dans tout le pays.
D’autres comportements peuvent aussi nous étonner. Comme les USA, ils cultivent une vraie culture de la délation du fait qu’ils n’ont pas connu la collaboration et la dénonciation des Juifs. Ils n’hésiteront pas à vous balancer si vous vous garez mal ou si vous allez faire vos besoins n’importe où (photos diffusées publiquement à l’appui).
Vous ajoutez là dessus une bonne couche de pudibonderie issue de l’époque victorienne qui se ressent encore jusque dans leurs horaires. Jusqu’à la fin des années 60, les gens finissaient le boulot à 17h, se murgeaient très rapidement avant fermeture des ventes d’alcool à 18h, et rentraient chez eux complètement ivres. C’était d’ailleurs l’un des seuls moyens de finir bourré avec leurs bières légères. Il en reste des traces aujourd’hui : l’alcool est interdit en centre-ville, la bière et le vin s’achètent uniquement avec une carte d’identité en supermarché (les alcools forts y sont toujours interdits), les barmans peuvent toujours demander votre carte d’identité si vous avez le malheur de faire plus jeune que votre âge, et plus surprenant : la vente d’alcool est totalement interdite le jour de Paques. Des règles dures sur les drogues et l’alcool qui ne fonctionnent pas. La consommation d’alcool est assez forte. La consommation de meth et de cannabis sont parmi les plus élevées du monde occidental.

Esprit XIXème toujours, le pays nous semble très sexiste. L’homme aura des plaisirs virils (tracteurs, poker, chasse, bars) mais peu de magasins d’habillement et encore moins d’occasions de s’épanouir hors du cadre viriliste. La femme aura plus de choix de mode, mais beaucoup moins d’occasions de sortir ; son rôle et beaucoup de ses opportunités de travail étant confinées à la maison. C’est peut-être biaisé parce que nous avons passé beaucoup de temps dans des milieux ruraux, mais au vue de la place des métiers dans la construction ou l’industrie là où on va, c’est le constat qu’on en tire. Le pays est là aussi dans le top des violences domestiques parmi les pays développés.
Bref, dans l’ensemble, vous avez parfois l’impression d’être dans une colonie anglo-américaine avec des gens assez « grossiers » et adeptes du style bottes/bermudas, avec qui vous plaisanterez facilement mais n’arriverez pas à avoir d’autre échange.
Et les backpackers ?
Nous avons heureusement rencontré aussi beaucoup de backpackers… plus ou moins. Nous sommes tous très semblables au moment où nous nous rencontrons. On bosse dans un job merdique abrutissant avec des horaires pas possibles, et on pense au road-trip. Ca limite un peu les échanges : « wouah ça a l’air trop bien », « tu devrais trop aller là bas » et « j’en peux plus de ces kiwis ». Il y a bien les sud-américains, venus pour travailler dans des jobs nuls aussi bien payés que chez eux. Même en s’épuisant à la tâche, beaucoup gardent un sourire communicatif et ont des choses à partager.

En dehors de ça, beaucoup de backpackers ont des étoiles dans les yeux pour les paysages néozélandais et ont l’impression de conquérir le monde en voyageant. On ne s’y retrouve pas totalement. Et d’autres sont venus pour s’éclater loin des querelles politiques françaises… Et je me sens trop vieux pour aller en boite le weekend avec des jeunes de 20 ans sans aucun esprit critique. Bref… heureusement, nous avons eu des wwoofings (ce n’est pas ironique, c’est définitivement nos meilleures expériences !).
C’est tout pour cet article de hater. Il a fait 10°C et il a plu sans cesse pendant 2 semaines en plein été… donc ça fait du bien ! Dans les prochains articles, Lucie vous expliquera l’envers du décor de la vie nomade, et j’indiquerai nos propres « échecs ». Car critiquer les autres c’est bien, mais se critiquer soi-même, c’est mieux !
Cet article me laisse … pensive
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On a compris que tu ne t’installerais jamais en Nouvelle Zélande !
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